Le viaduc de Kerdeozer
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Ce viaduc est un pont de chemin de fer qui franchit le profond vallon à Kerdeozer en Plouguiel.
Il s’organise en dix arches en plein cintre de sept mètres d’ouverture chacune. Les piles, à section évidée en double T, avec tranches en béton armé, font 180 cm de largeur et 331 cm de longueur. Elles supportent le tablier en béton armé.

L’histoire de ce monument
Le penseur et le créateur de ce viaduc est le briochin, Louis Harel de La Noë (1852-1931). Il est ingénieur des Ponts et Chaussées et de retour dans son département en décembre 1901, il est nommé ingénieur en chef des Ponts et Chaussées. Il jouit déjà d’une excellente réputation et est alors considéré comme le plus apte à réussir ce difficile projet qu’est la mise en place d’un réseau ferroviaire secondaire départemental. Ainsi, une vingtaine de lignes « du réseau ferré d’intérêt local » naissent sous sa direction avec la réalisation de nombreux ouvrages d’art comme la gare centrale de Saint-Brieuc, les viaducs de Toupin et de Souzain… et celui de Kerdeozer !
Ce pionnier de l’utilisation du béton armé est un adepte de procédés de construction réfléchis et audacieux comme pour le Pont Noir, situé sur le Guindy en amont de ce viaduc. Aujourd’hui, plus de 300 ouvrages, dont la majorité sont situés dans le Grand Ouest témoignent de l’énergie et de la volonté de construire de cet esprit brillant !
Inauguré en 1906, ce réseau ferroviaire secondaire remplira sa mission jusqu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, acheminant les marchandises et les hommes bien loin du Trégor. C’est par le « petit train » que les mobilisés d’ici partiront pour la Première Guerre mondiale après la mobilisation générale d’août 1914.
Mais, le développement du réseau routier emprunté par des voitures et des camions de plus en plus rapides rendra obsolète ce réseau secondaire. Louis Harel de La Noë l’avait annoncé : « Je fais mes trains pour cinquante ans, ensuite la route reprendra ses droits ».
Le viaduc, a failli disparaître durant la Second Guerre mondiale, les résistants ayant tenté de le faire sauter le 16 avril 1944. Mais deux des trois charges posées n’ont pas explosées. Mais quelques jours après deux piliers de la passerelle dite de Saint-François sont abattus par des explosifs. Le trafic sera alors interrompu jusqu’en mai de la même année.
La réhabilitation de ce viaduc, décidée par le Conseil Départemental et actée entre 2017-2018 est le fruit de passionnés comme le couple Chouteau de Penvenan ou Yvon Le Vaou et d’associations locales. Leur volonté de préserver ce témoin de l’histoire ferroviaire locale trouvera écho auprès des municipalités plouguielloises successives. Et c’est logiquement que le 22 mai 2018, Jean-Yves Nédélec, alors maire de Plouguiel est associé à Alain Cadec, alors Président du Conseil Départemental des Côtes D’Armor lors de la cérémonie de réouverture du viaduc. Celui-ci, fort de garde-corps sécurisés et d’un nouveau revêtement, pour un coût total de 272 000 euros, est alors à nouveau capable de remplir sa nouvelle mission sur cet itinéraire européen !


La voie verte est ouverte, les prommeneurs peuvent à nouveau s’appuyer sur les parapets refaits à neuf. Photo d’Alexis Gaillots – août 2018.

La fonction de cet ouvrage :
C’est au tout début du XXème siècle, que le Conseil Général des Côtes du Nord se décide a financer un réseau ferroviaire « à voies étroites » qui a pour mission de désenclaver les zones rurales du département. Et ici principalement Tréguier et son arrière-pays, alors à l’écart des circuits commerciaux dynamiques (peu de routes et la ligne ferroviaire Paris-Brest s’arrête alors à Saint-Brieuc !).
Ce viaduc est construit afin que les trains qui faisaient la liaison Tréguier-Perros-Lannion puissent franchir la vallée escarpée de Kerdeozer (1906-1949).
Aujourd’hui, cet ouvrage d’art a trouvé une nouvelle mission. Il participe à rendre possible et cohérente la voie verte (itinéraire européen : Eurovéloroute 4, qui est la liaison vélo Roscoff-Kiev). Cet itinéraire fait également partie du Grand tour de Manche (1000 km) qui suit les littoraux anglais, normand et breton.


Louis Harel de La Noë

Photo d’Alexis Gaillots – août 2018